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23.7.07

Attention danger : parc d'attraction


Sea world est un parc acquatique, un business dans lequel les Américains excellent. Dans le divertissement. Dans l'entertnaiment. Dans les Graceland -le 17 juillet sera le 30è anniversaire de la mort d'Elvis !- , les Disneyland et companies. A tel point qu'il est devenu aujourd'hui une sorte d'opium du peuple. Il suffit de se rendre à Sea World à San Diego ou dans n'importe quel parc d'attractions made in ou by the USA pour observer la façon dont on endort le cerveau des gens pour les faire consommer. Certains diront que personne n'oblige personne à passer une après-midi dans ce genre d'endroits. Oui. C'est vrai. Mais peut-on honnêtement penser que chaque acte de consommation est motivé par un consentement libre et éclairé ? Pourquoi s'acheter une énième paire de jeans, un tee shirt siglé etc... Consommer permet de ne pas réfléchir. C'est parfois nécessaire et jouissif. Mais c'est trop souvent un mirroir aux alouettes et un tonneau des danaïdes. Rien de nouveau sous le soleil. Sauf qu'à Sea World avant le show des Orques, une jeune femme, qui fait partie du spectacle, fait une petite annonce avant le lancement des festivités. Elle exprime sa solidarité aux soldats américains et aux nations qui sont les alliées de l'Amérique, à celles qui partagent cette même vision du monde. Vous avez dit propagande ?!

Pour ceux qui s'intéressent à ce que signifie aller faire la guerre, Winter Soldier est un documentaire exceptionnel à ce sujet là.
En 1972, des soldats américains reviennent du Vietnam et décident de créer le Veterans against War, un mouvement pour arrêter le carnage. Leur seule arme : leurs témoignages. Ils réunissent des journalistes dans un hôtel de Detroit dans le Michigan et racontent ce qu'ils ont vu, ce qu'ils ont fait. Ils racontent comment l'armée les a préparé à être des animaux, comment elle leur a lavé le cerveau, comment elle leur a appris à modifier la réalité pour survivre. Plus d'émotions. Ils ont été déshumanisés. Ils ont déshumanisé. Les Vietnamiens ne sont que des cibles. Des êtres à torturer. Ils racontent comment leur esprit oubliait. Il fallait partir sauver la nation. Ils sont ses super héros. Ils racontent la prise de conscience de cette folie. Ils racontent leur envie de revenir dans le monde humain. Ils ont 19, 20, 22 ans. Ils témoignent. Dés la sortie de ce film, ces jeunes ont été accusés d'anti-patriotisme. La plupart n'ont jamais reparlé. Comment ont-il survécu ? Où sont-ils aujourd'hui ? Ils avaient les cheveux longs et avaient entendu parlé de Woodstock.
Winter Soldier est resorti en 2005 grâce aux finances de Jane Fonda. Il est aujourd'hui disponible en dvd
www.wintersoldierfilm.com

9.7.07

Comment te dire adieu ?

RdV#9 •• Analyse •• Par Antoine Couder. Photo Alain Declercq.

C’est encore un petit groupe d’irréductibles qui, pour l’instant, ont préféré rester anonymes, et pour qui la victoire de Nicolas Sarkozy sonne le glas d’un bien beau vivre ensemble. Récit imaginaire d’une longue veillée funèbre.
Ils sont sonnés, depuis le dimanche noir de l’élection présidentielle. Ils hésitent entre revisiter le site d’Arte qui parodie à loisir la rhétorique de Nicolas Sarkozy (mais pour combien de temps encore, s’inquiètent-ils) et se replonger dans la lecture de La Résistible Ascension d’Arturo Ui, une pièce de Bertolt Brecht qui raconte comment un minable gangster prend le pouvoir à Chicago sous prétexte de protéger un mystérieux trust des choux-fleurs. Ils caressent alors le projet de créer un Front de libération du chou-fleur. L’idée leur arrache un sourire. Mais ils n’ont pas le cœur léger tant ils sont occupés à enterrer définitivement cette gauche de gouvernement qui se révèle incapable d’assurer une alternative crédible, et qui emporte avec elle l’idée qu’ils se faisaient du XXe siècle, c’est-à-dire une combinaison réussie de la croissance et de la solidarité qui produirait de la culture. Les voilà donc sidérés devant cet écroulement, cette façon de remplacer Jeanne Moreau par Jean-Marie Bigard, de menacer de supprimer purement et simplement le ministère de la Culture ou de travailler au corps le contrat de travail à durée indéterminée.

Est-ce que tu es sérieux ?
« Mourir ou changer », écrivait Zaki Laïdi, à propos de la nécessité pour le Parti socialiste de se rénover (1). Or, changer, il n’en est pas question. Les voici donc prêts à mourir en leur pauvre cœur, dans le silence, l’aversion (du latin aversio), le simple « regard détourné » ; dans ce soi-disant respect de l’adversaire dont Ségolène Royal avait tenté bien en vain de se faire la messagère. Bien sûr, ils sont en colère, mais sans doute le sont-ils autant contre elle que contre lui. Le gâchis, la terrible vérité des urnes, les peines fermes et définitives qui clôturent la tentative de jouer à Counter-Strike en direct, dans les rues des grandes villes (2). À quoi auront donc servi tous ces rapports officiels soulignant le caractère pathogène de l’incarcération des plus jeunes ? À rien, sinon à charger encore la liste de ce à quoi il faut dire adieu maintenant : au fait de croire à une certaine légèreté et peut-être même à l’existence d’un second degré, à l’idée que l’on n’est pas sérieux quand on a dix-sept ans, au fait que l’on n’est pas majeur pénal à seize ans, ou encore, qu’il existe ce que l’on appelle une Protection judiciaire de la jeunesse.

« De tout mon cœur d’enfant »

La ville se referme et la classe dangereuse est renvoyée au lourd devoir d’héroïsme, à la mort tragique d’un Guy Môquet dont on a extrait la substance communiste pour ob-tenir un concentré de compassion. « Je vais mourir, écrit-il dans une lettre à sa mère… Ce que je te demande, ce que je veux que tu me promettes, c’est d’être courageuse et de surmonter ta peine… Je vous quitte tous, toutes… en vous embrassant de tout mon cœur d’enfant. Courage ! » (3) Une lettre que l’on peut lire dans la station de métro qui porte le nom du jeune homme et qui sera dorénavant lue chaque année aux élèves de l’Éducation nationale, à l’occasion de la rentrée scolaire (4). Commence alors ce drôle de deuil rendu clandestin par la loi inflexible de la majorité. Comment le peuple a-t-il pu à ce point se tromper sinon justement parce qu’on l’a trompé en beauté, usant d’images et de propositions qui troublent ses facultés. Dans chaque déclaration du président leur apparaît alors le signe du mensonge, le venin de la communication, cette « imitation de la réalité » dont parlait Socrate lorsqu’il s’agaçait de la suprématie de la peinture sur la pensée. « Tu as atteint ton but. Assoiffé de revanche, tu as vaincu tes démons intérieurs pour trouver la force de tuer le dieu de la guerre et t’approprier son trône. Mais trop longtemps tu as vécu dans l’ombre des autres dieux : il est temps d’en finir. » (5)

La culture du « hein ? Quoi ? »
Et cela commence par la nomination de Bernard Kouchner au poste de ministre des Affaires étrangères, geste extrême qui vient brouiller les cartes des valeurs et confirmer la liquidation de mai 68. D’un côté, il n’y a qu’une France, il n’y a qu’une sorte d’intérêt… Il n’y a donc plus à hésiter ; comme l’écrit The Economist, « à quoi sert-il de voter à gauche puisque la gauche est déjà au gouvernement » (6) ? Ensemble, tout devient possible. Voilà un slogan qui n’a pas été suffisamment analysé. Ce qui devient possible, c’est donc un brouillage général, comme si nous entrions aujourd’hui dans la culture du « hein ? Quoi ? ». Un brouillage qui s’étend sur la moindre parcelle de réalité. Partout, la règle simple est contestée, la jurisprudence rediscutée. « Je ne vois pas pourquoi », comme dit le président… C’est ainsi que l’état d’exception finit par devenir la règle, en France comme aux États-Unis. « Hein ? Quoi ? ». La vie politique s’installe dans une tension permanente entre la demande de procédure démocratique et un pouvoir exceptionnel qui se développe et se concentre entre les mains de l’exécutif. Et même s’il faut être bien mal informé pour croire qu’un média peut verrouiller l’opinion, il faut sans doute être très malin pour faire passer un « message ». Il faut s’appeler Eva Joly pour se permettre de dire que le problème français en matière de corruption des élites, c’est en grande partie une « allégeance au président de la République » (7), une soumission féodale au chef tout-puissant, seule véritable garantie de protection. D’ailleurs, regardez comme nous pouvons être indulgents avec Jacques Chirac. Regardez comment le nom de Jean Tiberi inscrit sur la liste des élus de la République ne nous fait pas sursauter. Car, évidemment, « tout se tient », comme disait « l’autre » (8) : il n’y aura effectivement aucune amnistie présidentielle pour les infractions au code de la route, mais il sera toujours bien compliqué d’y voir plus clair dans l’affaire Clearstream.

Do not opensource la Résistance
« Hein ? Quoi ? », ce serait vraiment le super gimmick du Front de libération des choux-fleurs si d’aventure, le groupe consentait à s’organiser. En attendant, il faut être très vieux et vivre loin de Paris pour alpaguer le président de la République à l’antenne de France Inter et affirmer qu’on lui refuse le droit d’« opensourcer » l’idée de Résistance, en transformant sa balade sentimentale sur le plateau des Glières en une communion avec l’Histoire (9). Il faut être un vieux résistant grognon, spectre vivant de la mémoire qui s’efface, pour dénier au jeune élu suprême le droit de faire le tri entre le gaullisme et les ordonnances de 1945, les « compagnons de la Libération (plutôt de droite) » et le Conseil national de la Résistance (qui comptait notamment des communistes). Ce pack français, ce socle constitutionnel qui, jusqu’ici, nous tenait ensemble et qui semble aujourd’hui menacé pour cause de « rupture ». De cette rupture, de cette séparation, on voudrait encore pouvoir discuter. Et, pour commencer, répéter ces mots entendus par hasard, au détour d’une Histoire(s) du cinéma : « … Il disait que la fidélité si grande soit-elle est sans effet sur la marche du temps, qu’elle n’est susceptible de rien ressusciter, ni personne, et que néanmoins, il n’est d’autre solution que la fidélité »10. Une bien belle façon de se dire adieu.

(1) In Libération, 8 mai 2007. (2) Selon les chiffres du ministère de l’Intérieur, le bilan des trois jours d’émeutes post-élection est de 80 policiers et gendarmes blessés, 2 000 voitures brûlées et 887 interpellations. (3) Mais il y a mieux encore dans le genre, par exemple : « Entre ici, Jean Moulin, avec ton terrible cortège, ceux qui sont morts dans les caves sans avoir parlé comme toi et même, ce qui est peut-être plus atroce, en ayant parlé. » Hommage d’André Malraux à Jean Moulin, décembre 1964. (4) C’est la première décision présidentielle de Nicolas Sarkozy afin de faire prendre conscience aux jeunes collégiens français de ce qu’est l’amour de la France, « un amour qui peut et qui a souvent conduit au sacrifice », comme il dit. (5) Puisque la culture est aujourd’hui en voie de dilution dans le monde du divertissement, il est sans doute difficile pour le non-spécialiste de faire la différence entre un texte classique et cette baseline publicitaire du nouveau jeu sur Playstation 2, God of War, « L’origine de la fin ». (6) The Economist, 26 mai 2007, article « The Kouchner Effect ». (7) In La force qui nous manque, par Eva Joly (avec Judith Perrignon), éditions Les Arènes , mai 2007. (8) Ségolène, bien sûr. (9) « Créer, c’est résister, résister, c’est créer », Là-bas si j’y suis , Daniel Mermet, 24 mai 2005, suite à la visite du candidat Sarkozy venu rendre hommage à ceux qui, ici, sont morts pour la patrie. (10) Histoire(s) du cinéma, Jean-Luc Godard, ECM Series, 1998.

Didier Lestrade, le bonheur est dans l’après

RdV#9 •• Idées •• Par Philippe Noisette. Photos Salvatore Caputo.

Journaliste, militant, fondateur d’Act Up-Paris et cocréateur du magazine Têtu, Didier Lestrade signe avec Cheikh, Journal de campagne, un manifeste contre le « marasme gay ». Interview sur l’air du temps et propos sans complaisance.
Didier Lestrade a raconté la naissance d’Act Up, osé son Journal des années 80 ou alarmé sur l’attitude de certains gays suicidaires par leur comportement sexuel avec The End. Trois livres touffus, brillants souvent, maladroits parfois. Mais Lestrade, quoi qu’on en pense, reste une voix essentielle dans le paysage homo. Cheikh, joliment sous-titré Journal de campagne, raconte son installation en Normandie, sa vie nature. Ou comment s’émerveiller devant une tulipe en fleur. Sans oublier quelques coups de gueule contre ce « marasme gay » actuel qu’il dénonce. On passe du rire au plus sérieux. On s’énerve aussi. Du pur Lestrade, mais assagi. Il est question dans ces pages de Henry David Thoreau, un Américain du XIXe siècle parti vivre dans une cabane au bord d’un lac. Walden, le récit qu’il en tira, a marqué Lestrade. Mais Cheikh est également un livre actuel, en prise directe avec notre monde, et politique. Donc s’adressant aux gays, jeunes et moins jeunes. Et aux autres. En attendant (peut-être un jour) l’ouvrage sur la dance music que Didier Lestrade nous doit.

Philippe Noisette : Christine Boutin au gouvernement, envie de réagir, non ?
Didier Lestrade : Ca ne me dérange pas plus que d’autres choses. Boutin n’est pas à un ministère déterminant et il y aura toujours des députés homophobes comme Vanneste (1). L’important est de savoir où s’arrête leur liberté d’expression et comment s’assurer qu’ils n’agressent pas sans cesse des minorités qui se sentent concernées par leurs propos. C’est une question d’autorité gouvernementale. On verra comment le gouvernement Sarkozy va se comporter. Je crois savoir qu’il n’aura pas de scrupules à virer les personnes qui posent problème.

Philippe : Les agressions homophobes en augmentation : est-ce à dire que l’on se trompe sur la « relative » acceptation des homos en France ?
Didier : Les initiatives contre l’homophobie sont des combats nécessaires. Je ne crois pas que les cas soient en augmentation puisqu’il n’y avait pas de statistiques avant. Je ne crois pas non plus que ce soit l’alpha et l’oméga de la question gay aujourd’hui. Quand je vois des papiers, dans Le Monde et dans Préférences, sur les travaux d’Éric Verdier (2), qui dit que l’homophobie est si importante actuellement qu’elle fragilise les hétéros… c’est n’importe quoi. Un hétéro, même jeune, qu’on traite de tapette, il rigole. Les jeunes hétéros n’ont jamais été aussi cool avec les gays : si vous voulez que je vous rappelle comment c’était il y a vingt ans, je peux le faire. C’était beaucoup plus violent et en plus, les gays étaient invisibles. Le succès même de la Gay Pride en est une preuve et il y a beaucoup de gays qui sortent en boîte avec des hétéros, ce qui ne se faisait jamais avant. En fait, l’obsession de l’homophobie est consensuelle dans un milieu associatif LGBT (lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres) qui se déchire avec rage. C’est le dénominateur commun qui permet de ne pas aborder les questions plus graves : si les gays sont vus sans cesse sous l’angle victimaire, est-ce que cela les dégage de leurs responsabilités en termes de prévention du sida et de santé publique ? Non. Et ça, personne ne le dit. Une minorité ne doit pas seulement exiger, elle doit nourrir la société par sa réflexion et ses efforts, ce qui n’est plus le cas aujourd’hui.

Philippe : Vous ne fréquentez plus la Gay Pride ?
Didier : Je n’y vais plus parce que je connais par cœur, mais je suis content que ce soit un succès. Je suis content pour ceux qui y vont.

Philippe : Être gay ou lesbienne en 2007, c’est plus de consommation et moins d’engagement ?
Didier : C’est une consommation forcenée et un engagement absent. Dans la zone publique, on s’offusque des scandales homophobes, mais dans la zone privée, c’est chacun pour soi, et franchement, la grande majorité des gays et des lesbiennes ne sont pas concernés par les problèmes des transsexuels, je vous l’assure. Avant de faire semblant de s’engager pour des gays et des lesbiennes en Irak, il serait judicieux de régler le problème en France. C’est facile de critiquer ce qui se passe ailleurs, plus difficile de poser la question de notre propre racisme homosexuel envers les autres. Et il est bien réel !

Philippe : Vous vivez à la campagne, le fameux « loin de Paris », mais votre regard sur la communauté gay reste juste, et parfois implacable…
Didier : Ce qui est fascinant, c’est que cette communauté perd son humour. J’ai une réputation de grincheux militant, mais ce sont les gays qui ont jeté leur autodérision aux oubliettes. Si on ne peut plus faire de blagues sur les nounours, les mecs cuir, les folles fashion, alors, c’est que le politiquement correct interdit d’émettre le moindre avis sur cette communauté qui ne soit pas le sempiternel : « On souffre ! » Il est facile de remarquer que les seuls gays affirmés qui sont respectés dans le cinéma ou la littérature sont des séronégatifs flippés et ils en jouent pour faire des films qui vont à Cannes. La société adore ce côté plaintif gay. Mon avis définitif, c’est que les gays, en tant que minorité, souffrent beaucoup moins que les autres minorités non visibles de la société, comme les Arabes et les Noirs. Il faut arrêter de se plaindre. Nous disposons d’un tissu associatif, de médias, de moyens non négligeables, de traitements contre le sida, de voyages à l’étranger, d’une écoute politique ; il faut s’en servir pour montrer que les gays peuvent à nouveau être leaders en termes de politique et de création. C’est loin d’être le cas – et le reste de la société le voit. Il est possible de sortir de ce marasme gay.

Philippe :
Dans votre dernier ouvrage, on découvre un Lestrade dont la colère est plus rentrée. Pourtant, la situation sur pas mal de fronts n’est pas si différente. Parce que vous êtes fatigué d’être l’un des seuls qui élève la voix, que vous voulez vous protéger ou que vous faites un constat d’échec ?
Didier : Tout à la fois : l’échec, l’autoprotection, l’envie de dire ce que je pense avec liberté, faire le point, l’espoir naïf que cela puisse servir à certains. Je suis fasciné par le côté aphone de cette minorité, qui n’aborde jamais les problèmes de notre vieillesse, de nos engagements oubliés, de l’impact d’internet sur notre sexualité, de la fuite massive vers la psychanalyse. Nous avons sacrifié de nombreux principes pour le luxe de pouvoir baiser à nouveau sans contrainte. On croit oublier le sida en développant une épidémie morale qui est en train de produire une deuxième vague du sida, uniquement chez les gays des pays riches.

Philippe : Journal de campagne, c’est votre « lettre à un jeune gay » ?
Didier : Oui, dans un sens, je m’adresse aux gays de mon âge pour relever leurs questions, mais je me tourne vers les jeunes car nous avons besoin de « passeurs », d’aînés qui racontent la vie d’avant et qui puissent faire des parallèles avec ce qui se passe aujourd’hui. Ce n’est pas de la nostalgie, ce sont des pistes pour le futur. Et en plus, je suis tombé amoureux d’un mec génial de 25 ans !

Philippe : La place de la musique dans votre vie aujourd’hui ?
Didier : Elle est secondaire, car j’ai vraiment passé quarante-cinq ans à être à fond dedans, depuis tout jeune, et je n’ai plus peur de dire que je suis largué dans certains domaines. C’est reposant.

(1) Christian Vanneste, député UMP condamné pour propos homophobes le 25 janvier dernier.
(2) Psychologue, chargé de mission à la Ligue des droits de l’homme et coauteur avec Jean-Marie Firdion de Homosexualités & suicide, H&O éditions, 2003.

Cheikh, Journal de campagne, éd. Flammarion, 345 pages, 22 euros.